Les adolescentes sont plus nombreuses à se
faire percer le corps que leurs congénères masculins, selon
cette étude.
Le
petit anneau planté dans le nez de votre cher ado n'est peut-être
pas aussi inoffensif qu'il y paraît. Et celui dissimulé sous
son t-shirt, accroché à son nombril, encore moins. Parents,
ouvrez l'oeil: les jeunes percés de partout seraient plus à
risque en ce qui a trait aux mauvaises fréquentations, aux
relations sexuelles précoces, au tabagisme et aux problèmes
scolaires divers.
C'est
du moins ce qui ressort d'une étude menée par le pédiatre
Timothy Roberts, de l'Université de Rochester, dans l'État
de New York, soumise à la revue scientifique Pediatrics.
Après avoir souligné le lien qui existait entre les jeunes
tatoués et divers comportements délinquants l'an dernier, le
pédiatre revient ici à la charge avec un sujet tout aussi
actuel: le body piercing.
S'étant inspiré d'un sondage national mené en 1996 (le
National Longitudinal Study of Adolescent Health), Timothy
Roberts a ici recueilli les témoignages de quelque 4595 Américains,
âgés de 12 à 21 ans, cherchant à déceler une relation
entre le body piercing et divers comportements à
risque.
Résultat? Les adolescentes sont plus nombreuses à se faire
percer le corps que leurs congénères masculins: 7,1% des
filles interrogées ont affirmé avoir un anneau ailleurs qu'à
l'oreille, contre 1,6% des garçons. Parmi ceux-ci, ce sont
les adolescents les plus âgés, vivant dans des familles
monoparentales plutôt aisées, qui sont les plus susceptibles
de se faire percer une narine, un sourcil, le nombril, la
langue, un mamelon ou l'organe génital.
Les jeunes percés sont aussi plus nombreux à avoir des fréquentations
douteuses: 13% ont reconnu que leurs meilleurs amis fumaient
quotidiennement, buvaient un verre et se roulaient un petit
joint régulièrement. À l'opposé, 30% des jeunes non percés
ont affirmé qu'aucun de leurs proches ne s'adonnait à ces
divers vices: pas de cigarette, pas d'alcool, encore moins de pot
dans leur entourage.
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En
ce qui a trait aux comportements à risques, les garçons
adeptes du body piercing sont cinq fois plus nombreux
à sécher les cours de temps à autre; chez les filles, les
relations sexuelles précoces, la cigarette et la délinquance
scolaire sont deux fois plus fréquentes chez ces demoiselles
percées que chez leurs collègues qui ne le sont pas. Les
jeunes filles percées sont aussi plus nombreuses que les
autres à faire preuve de comportements antisociaux. Fait à
noter, la recherche n'a démontré aucune corrélation entre
le body piercing et l'échec scolaire. Les jeunes percés,
même si leurs proches en font une consommation régulière,
ne sont pas non plus davantage à risque de consommer alcool
et autres drogues.
Les études sont nombreuses à avoir démontré un lien entre body
piercing et risques divers, au sein de populations bien spécifiques:
comportements sexuels dits «alternatifs», risques de
maladies transmissibles sexuellement chez les gais, etc. Plus
farfelue, une étude a même trouvé une corrélation entre le
piercing et le jeu, les adultes percés étant plus
nombreux à apprécier la roulette!
Cette dernière étude a l'avantage d'être la première à
sonder un échantillon aussi vaste et représentatif de la
population adolescente américaine. «Ce n'est pas le body
piercing en soi qui est un problème, souligne Timothy
Roberts, en entrevue téléphonique. C'est la décision que le
jeune prend qui est problématique.» Ainsi, si votre ado vous
indique qu'il souhaite se faire percer le mamelon, qu'il
discute de la question avec vous, que vous choisissez ensemble
où l'opération sera faite, en vérifiez les normes hygiéniques,
etc., il n'y a pas en soi de quoi s'inquiéter.
Mais si, par contre, le jeune prend la décision en cachette,
sans consulter personne, a des amis dont les parents ignorent
l'existence et les habitudes, alors peut-être que, oui, il y
a matière à s'interroger.
Quoi faire? Un body piercing, «c'est, pour un parent,
un bon prétexte pour avoir une petite discussion avec son ado»,
résume le pédiatre. Pas la peine de l'enfermer dans sa
chambre. Il suffit tout simplement de s'asseoir avec lui pour
jaser, suggère-t-il : jaser de ses intentions, mais aussi de
ses fréquentations, ses habitudes, l'école, sa vie, la vie.
Richard Tremblay, titulaire de la chaire de recherche du
Canada sur le développement de l'enfant, à l'Université de
Montréal, n'est pas surpris de ces résultats. «Ça n'est
pas surprenant du tout, dit-il. Les individus qui présentent
des comportements à risque vont faire toutes sortes de
choses, dont se mettre des boucles d'oreilles partout.»
Mais attention, prévient-il, il ne s'agit pas là d'une
relation de cause à effet. En un mot: ce n'est pas parce
qu'un jeune a un anneau au nombril qu'il aura des amis délinquants
pour autant. Il sera seulement plus susceptible d'en avoir. Ce
genre d'étude «ne renseigne pas, dit-il. Ne nous dit pas:
qu'est-ce qui cause ce phénomène? pour qui est-ce un problème,
pour qui n'est-ce pas un problème?» Certains ados à problèmes
se font effectivement percer le corps partout. D'autres, sans
histoire, aussi. Mais cela, cette étude ne l'explique pas.
Article
redigé par Silvia
Galipeau ,le
15 mai 2002.
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